La procédure de surendettement

En bref
Lorsqu’un particulier ne parvient plus à honorer ses charges et à assumer le remboursement de ses dettes, la procédure de surendettement apparaît comme le dernier recours pour éviter que la situation ne devienne irrémédiable. Supervisée par la Banque de France, elle vise à mettre en place des actions concrètes pour honorer le recouvrement des sommes dues sur le long terme :
- la procédure de surendettement passe par le dépôt d’un dossier qui est examiné en commission de surendettement ;
- la commission analyse la situation personnelle et financière du débiteur pour déterminer s’il dispose des moyens nécessaires pour honorer ses dettes ;
- si le dossier est recevable, elle met en place un plan conventionnel de surendettement visant à obtenir un accord à l’amiable entre le débiteur et ses créanciers ;
- ce plan peut comprendre un rééchelonnement de dettes, un report d’échéances ou un effacement partiel ou total de dettes ;
- si aucun accord n’est trouvé, la commission peut ordonner des mesures unilatérales ou mettre en place un plan de redressement pour effacer les dettes avec ou sans liquidation judiciaire selon le patrimoine du débiteur.

Qu’est-ce qu’une procédure de surendettement ?
Une gestion budgétaire hasardeuse, de mauvais choix financiers ou encore des aléas de vie (maladie, accident, perte d’emploi) peuvent conduire à une accumulation de dettes auxquelles il est très difficile de faire face. S’il existe des solutions pour tenter de surmonter ces problèmes financiers (réduction des charges, report de mensualités, rachat ou renégociation de crédits), celles-ci sont parfois insuffisantes pour surmonter cette période et assainir ses finances. Lorsque la spirale du surendettement est enclenchée et qu’assumer ses différentes charges récurrentes devient impossible, déposer un dossier de surendettement devient l’ultime recours.
Si elle n’est pas neutre d’un point de vue psychologique, la procédure de surendettement est pourtant la dernière alternative pour éviter que la situation ne s’aggrave. Elle vous protège en effet tout au long du processus contre les saisies sur biens et les démarches de recouvrement intentées par les créanciers. Seules restent à régulariser pendant cette période les dettes alimentaires et les dettes pénales (ordonnées par un tribunal).
Dans les faits, elle consiste à analyser la situation financière du débiteur surendetté afin de trouver des possibilités d’aménagement et de régularisation des dettes en concertation avec les différents créanciers. La procédure de surendettement vise ainsi à parvenir à un accord à l’amiable avec des mesures dont les termes conviennent à chacune des parties. Elle permet donc à une personne surendettée de prendre le temps de restructurer ses finances sur le long terme en s’engageant à la réalisation d’actions concrètes devant permettre le remboursement de ses dettes.
Puis-je lancer une procédure de surendettement ?
La procédure de surendettement est une démarche gratuite, accessible à toute personne faisant face à une incapacité manifeste à assumer ses dettes professionnelles et non professionnelles exigibles et à échoir (articles L711-1 et L711-2 du Code de la consommation). Certains critères sont néanmoins à respecter.
Les publics concernés
Les personnes pouvant solliciter une procédure de surendettement doivent répondre aux conditions suivantes :
- être un particulier (une personne physique). Les entrepreneurs individuels dont l’entreprise a été radiée et qui ne détiennent que des dettes personnelles peuvent également solliciter ce dispositif ;
- être de nationalité française (quel que soit le lieu de résidence) ou être domicilié en France (quelle que soit la nationalité) pour des dettes détenues auprès de créanciers établis en France ;
- ne pas être en capacité de s’acquitter de ses dettes actuelles ou à venir, qu’elles soient personnelles ou professionnelles. Les entreprises ne sont pas concernées par la procédure de surendettement mais les dettes professionnelles contractées par un particulier sont éligibles. Il s’agit le plus souvent de cautions apportées à une société ;
- être de bonne foi c’est-à-dire ne pas organiser son insolvabilité.
Les personnes en couple ont la possibilité de déposer un dossier de surendettement en commun pour les dettes partagées. Elles peuvent également décider de réaliser des demandes séparées.
Les étapes de la procédure de surendettement
La mise en place de la procédure de surendettement passe par plusieurs étapes.
Le dépôt du dossier de surendettement
En premier lieu, le débiteur doit constituer un dossier de surendettement. Celui-ci peut être réalisé de 2 façons :
- sur papier avec un envoi par courrier à la succursale de la Banque de France du département de résidence ou directement à l’adresse de la Banque de France (Banque de France Surendettement - TSA 41217 - 75035 Paris Cedex 01).
Il faut alors imprimer ou venir chercher dans un guichet de la Banque de France le formulaire Cerfa 13594*02 et le remplir dans son intégralité. Vous devez également rédiger une lettre signée expliquant votre situation actuelle, les causes de votre surendettement et, le cas échéant, les éventuelles procédures en cours (saisies, procédure d’expulsion, etc.). Complétez enfin le dossier en y ajoutant les justificatifs, d’identité, de revenus, de dépenses, de patrimoine et les éléments détaillant les dettes contractées ;
- directement en ligne sur le site de la Banque de France via l’espace France Connect ou sur le site service-public pour ceux qui ne disposent pas d’un identifiant France Connect.
Sur le site de la Banque de France, créez votre espace personnel en vous rendant sur l’onglet “Déposer un dossier de surendettement en ligne” puis laissez-vous guider à chaque étape en complétant l’intégralité des informations demandées. Transmettez également les mêmes justificatifs dans l’onglet prévu à cet effet. Attention, le dépôt en ligne est uniquement ouvert pour les personnes qui déposent une demande seul.
Dans les deux cas, une fois le dossier transmis, une attestation de dépôt vous est envoyée dans les 2 jours ouvrables. La Banque de France vérifie qu’aucun élément n’est manquant et peut vous demander des pièces complémentaires si nécessaire. Vous pouvez par ailleurs vous faire accompagner par téléphone si vous avez des interrogations au moment de remplir le formulaire.
Les personnes en couple ont la possibilité de déposer un dossier de surendettement en commun pour les dettes partagées. Elles peuvent également décider de réaliser des demandes séparées.
Traitement du dossier
Une fois le dossier réceptionné, la Banque de France assure le secrétariat (soit directement, soit via la succursale concernée) pour son passage en commission de surendettement. Pendant cette période, vous devez continuer à vous acquitter de vos dépenses courantes (loyer, factures, pension alimentaire) et de vos crédits sans aggraver l’endettement (interdiction de souscrire un nouveau crédit). Le dépôt du dossier n’entraîne pas automatiquement la suspension des poursuites en cours mais vous permet de saisir un juge pour demander un moratoire pour les procédures d’expulsion ou de saisie.
Une fois la commission réunie, celle-ci statue sur la recevabilité de votre dossier à partir notamment de vos dettes, de votre patrimoine, de votre situation familiale et personnelle et de vos capacités de remboursement.. Elle dispose d’un délai de 3 mois pour décider de la recevabilité ou non du dossier. En cas d’irrecevabilité, vous pouvez contester cette décision et porter réclamation par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de 15 jours.
Si le dossier est validé et que la commission estime que vous êtes en mesure de rembourser vos dettes, un plan conventionnel de redressement est mis en place avec des mesures concrètes visant au remboursement des dettes comme notamment :
- des reports de remboursement ;
- des rééchelonnement de dettes ;
- un effacement partiel ou total de certaines dettes ;
- une renégociation du montant des intérêts des crédits ou des dettes ;
- la revente d’un bien immobilier même si la conservation du bien est privilégiée.
L’objectif de ce plan est d’obtenir un accord à l’amiable entre les parties. Sa durée ne peut excéder 7 ans sauf dans le cas d’un prêt immobilier à rembourser au-delà permettant d’éviter la cession du bien.
Si aucun accord n’est trouvé, la commission peut prendre des mesures contraignantes unilatérales comprenant notamment un gel des remboursements, un effacement partiel des sommes restant dues et un rééchelonnement des dettes.
Si en revanche, la situation financière et personnelle du débiteur ne permet pas le remboursement des dettes, la commission met en place une procédure de rétablissement personnel soit :
- avec liquidation judiciaire si le débiteur possède un ou des bien(s) immobilier(s), leur revente servant à apurer les dettes. Si le montant de la revente ne suffit pas à éponger l’intégralité des sommes dues, le montant restant est effacé ;
- sans liquidation judiciaire si le débiteur ne possède pas de patrimoine immobilier. Les dettes sont alors effacées.
Le suivi de la procédure
Pendant la mise en œuvre du plan conventionnel de redressement, la commission s’assure que le débiteur s’acquitte bien des nouveaux échéanciers de remboursement établis et qu’il n’aggrave pas sa situation personnelle par des dépenses déraisonnables ou la souscription d’un nouveau crédit.
Elle peut également contrôler le suivi des efforts budgétaires demandés, le déblocage d’une épargne prévue, la revente d’un véhicule programmée ou encore la recherche effective d’un emploi. Un intervenant social peut être mandaté pour accompagner le débiteur dans ses démarches.
Selon l’évolution de la situation, une adaptation des mensualités de remboursement peut être demandée si la situation s’améliore afin de réduire la durée du plan conventionnel. À l’inverse, si la situation s’aggrave et que vous ne parvenez pas à respecter les exigences du plan, un nouveau dossier de surendettement peut être déposé et le recours à un plan de rétablissement personnel peut être demandé.
Fin de la procédure
Le procédure de surendettement prend fin de plusieurs façons selon la situation :
- lorsque le débiteur s’est acquitté de la totalité de ses dettes à la suite de la mise en œuvre des actions du plan conventionnel de redressement ;
- suite à la réalisation des mesures ordonnées par la commission de surendettement lorsque aucun accord à l’amiable n’a pu être trouvé entre les parties ;
- à la suite de la revente des biens du débiteur permettant l’apurement des dettes contractées ;
- lorsque le débiteur n’est pas en mesure de rembourser ses dettes, un plan de redressement sans liquidation judiciaire impose aux créanciers l’effacement des dettes détenues.
A qui faire appel pour m’aider dans ma démarche de surendettement ?
Il est possible de se faire assister dans la démarche de gestion du surendettement. Pour ce faire, plusieurs interlocuteurs sont à votre disposition :
- un travailleur social ou une assistante sociale. Ils peuvent notamment être sollicités dans un centre communal d’action sociale (CCAS), auprès de la CAF, en mairie ou encore auprès des services sociaux de la commune ou du département. Il est alors nécessaire de remplir la rubrique du dossier “Vous être assisté(e) par un travailleur social” ;
- un conseiller de la Banque de France sur rendez-vous ou par téléphone au 34 14 pour le remplissage du formulaire ;
- un point conseil budget (PCB) qui est une structure spécifiquement dédiée à l’accompagnement des personnes rencontrant des difficultés financières. Le PCB vous met en relation avec un conseiller qui procède à un diagnostic de votre situation et vous prodigue des solutions de bonne gestion financière. Il peut même entrer en contact avec vos créanciers le cas échéant. Il existe 500 PCB répartis partout sur le territoire français.
Quelles sont les conséquences d’une procédure de surendettement ?
Le dépôt d’un dossier de surendettement a un certain nombre de conséquences immédiates :
- l’inscription automatique sur le fichier des incidents de remboursement de crédits aux particuliers (FICP) avec toutes les conséquences qui en découlent (difficulté voire impossibilité d’obtenir un crédit, difficulté pour obtenir des moyens de paiement). Il s’agit d’une obligation légale. La durée d’inscription au FICP est de 5 ans au maximum, mais elle peut être levée de façon anticipée en cas de remboursement des dettes ;
- la possibilité de demander la suspension des saisies en cours (saisies sur biens, sur vente ou sur salaire) ;
- la possibilité de faire une demande de report de l’adjudication menant à l’expulsion de votre bien si celui-ci a été vendu aux enchères dans le cadre d’une vente forcée ordonnée par la justice ;
- le remboursement des dettes antérieures est interrompu sauf décision contraire d’un juge ;
- les intérêts et pénalités de retard sur les dettes sont gelées et les frais bancaires sont plafonnés.
Quelques conseils pour éviter le surendettement et mieux gérer ses finances
Pour éviter d’en arriver à une situation de surendettement, plusieurs pistes de réflexion doivent être envisagées le plus tôt possible :
- la réduction des charges mensuelles en analysant ses dépenses une par une chaque mois et en réduisant voire en supprimant les dépenses non-essentielles pendant un temps (loisirs, sorties, habillement, abonnements à des plateformes de streaming ou à la salle de sport, etc.) ;
- l’augmentation de ses revenus en améliorant sa situation professionnelle (promotion ou changement de poste), en créant une activité parallèle à votre emploi pour obtenir un complément de revenus (bricolage, jardinage, livraison, ménage, etc.), en mettant en location ponctuelle un bien détenu (bien immobilier, dépendance, chambre d’étudiant, voiture, etc.), en revendant des vêtements et objets inutilisés sur les plateformes entre particuliers ;
- la renégociation des crédits en cours de remboursement, notamment s’ils ont été souscrits à des taux d’intérêt élevés (crédit immobilier principalement) ;
- le changement d’assurance emprunteur dans le cadre d’une délégation d’assurance de groupe pour une assurance externe ;
- le rachat de crédits qui permet de regrouper l’ensemble de ses crédits en cours et de réduire ses mensualités grâce à un allongement de la durée de remboursement. Attention toutefois, cette démarche augmente le coût global du crédit.
Il existe donc de nombreuses solutions pour équilibrer ses finances et éviter l’ultime recours à la procédure de surendettement, le maître mot étant l’anticipation, notamment en se constituant petit à petit une trésorerie de secours bien en amont.